Les berbères au Nord-Mali, 2013
Ferhat Bouda s’est rendu à plusieurs reprises à Kidal, fief de la rébellion touarègue au Nord-Mali, à 1200 kilomètres de Bamako, enjeu stratégique majeur et miroir des instabilités locales. Ses images témoignent avec force d’une situation aussi médiatisée que méconnue ; le quotidien des membres du mouvement indépendantiste : entraînement des nouvelles recrues, sécurisation de leurs positions et administration totale de plusieurs villes et villages (Kidal, In Khalil, Tessalit etc.).
La zone contrôlée par les Touaregs indépendantistes reste très dangereuse du fait de la présence de groupes de narcotrafiquants et de djihadistes sur le terrain. Le MNLA, pris au sein d’une multitude de conflits croisés, recrute activement pour éviter les assauts des islamistes. Pour la première fois dans l’histoire de la rébellion touarègue, des femmes ont également décidé de prendre les armes. Dans cette société en effet, les femmes bénéficient d’un statut inégalé : détentrices des savoirs et des richesses, elles sont les gardiennes des traditions. Dès lors, leur implication dans le conflit militaire est le signe d’une nouvelle évolution de la rébellion.
Les Berbères au Maroc, 2016
La plupart des berbères vivant au Maroc, Ferhat Bouda est allé à leur rencontre à Tinfgam dans le haut de l’Atlas, dans la province de Tinghir et à Timetda. Qu’ils se soient établis sur des terres plus ou moins isolées, les Berbères se sentent tous ostracisés et ignorés à dessein par les pouvoirs locaux. Malgré l’absence d’infrastructures, par leur connaissance de l’environnement et leur savoir-faire, ils parviennent à s’auto-suffire. Leur mode de vie est intimement lié au territoire qu’ils habitent et s’organise au jour le jour suivant le rythme de la nature. Profondément attachés à leurs traditions, les berbères du Maroc revendiquent avec détermination leur identité amazighe.
Il s’agit bien là d’un acte de résistance contre l’assimilation et l’oubli à lesquelles ils sont assignés. L’espoir et l’avenir de ces peuples reposent ainsi tout entier sur la transmission aux générations futures des valeurs de cette culture millénaire.
Les Touaregs du Niger, 2016
Ferhat Bouda est parti à la rencontre de tribus touarègues au Niger, aux alentours des villes d’Agadez et d’Abalak. Profitant de l’ouverture exceptionnelle des routes, à l’occasion de la fête de l’indépendance du pays, il a pu se rendre dans certaines zones habituellement très difficiles d’accès et où l’insécurité est élevée. C’est dans les régions reculées qui abritent les campements des Touaregs, loin des influences de la mondialisation, des nouvelles technologies, que leur culture reste intacte. Mais l’isolement est à double-tranchant puisqu’il expose en même temps à l’oubli et à l’indifférence du reste du monde.
« Tanmurt », Les berbères en Algérie, 2017
« Tanmurt » signifie « La terre mère » dans la langue berbère.
« La Kabylie, une région au nord de l’Algérie, est ma terre, celle où je suis né. Depuis que j’ai quitté mon village, des fantômes – de ceux qui s’apparentent à des souvenirs d’enfance – me hantent. J’y suis cependant retourné à de nombreuses reprises, guidé par l’espoir de retrouver ces souvenirs. Mais à présent, la vie en Kabylie est dominée par la mort, l’amour est remplacé par la haine et la peur, et ces communautés se transforment progressivement en une vie de solitude.
Malgré la douleur et le chagrin que m’inspire ce constat, j’ai encore et toujours l’espoir de pouvoir changer les choses… »
Ferhat Bouda
Les Siwis, Berbères d’Égypte, 2017
En Égypte, les Amazighs se concentrent essentiellement dans l’oasis de Siwa, proche de la frontière avec la Libye, c’est le seul refuge de la culture berbère en Égypte. Ce village très isolé n’a été relié qu’en 1984 par une route goudronnée à la ville la plus proche, située à 300 kilomètres.
Auto-suffisants grâce à l’abondance d’eau dans la région, les siwis vivent de leur agriculture et de leur savoir partagé. Ils sont imprégnés d’un islamisme rigoriste qui rythme la vie de traditions et qui sépare strictement les hommes et les femmes. Ces dernières, en marge de la société, ne quittent que rarement la maison familiale et s’occupent exclusivement du foyer et des enfants. Il est interdit de les photographier et elles doivent sortir intégralement voilées, regard compris.
Les Berbères de Tunisie, une minorité en marge, 2019
De la création de la République tunisienne à aujourd’hui, l’État, sous l’effet d’un processus d’arabisation, refuse de reconnaître la culture amazighe, parce qu’elle ne s’inscrit pas dans le concept d’un État-nation. La politique de marginalisation a débuté dès l’arrivée au pouvoir d’Habib Bourguiba en 1956, qui voyait dans la culture Amazighe un frein à la modernité et par l’accélération du processus d’urbanisation, a contraint les Amazighs à quitter leurs villages.
Sous la présidence de Ben Ali, s’est opérée une mise à l’écart largement fondée sur le fait que toute revendication identitaire non-conforme à une « pensée unique » était perçue comme une source de fracture avec la nation. Depuis la révolution de 2011, des associations de défense de la culture Amazighe ont vu le jour et mènent un combat juridique et médiatique pour faire avancer la reconnaissance de la spécificité berbère.