Mille huit cent âmes et sept églises.
Située aux confins des Appalaches, Mullens, petite bourgade bâtie entre voie ferrée et rivière, est l’un des bourgs les plus reculés de Virginie-Occidentale où la moitié des maisons et des boutiques paraissent abandonnées depuis longtemps. La beauté naturelle de cette région dissimule la pauvreté qui s’y ancre. Il suffit de quitter l’Autoroute, prendre des voies secondaires, pour voir proliférer des petites églises baptistes et des mobile homes. Dominant la ville, une croix et trois hauts parleurs inondent quatre fois par jour, les rues désertes du son d’un carillon.
L’époque de la grande Virginie Occidentale – celle du bastion du New Deal ou celle du mouvement ouvrier « Mother Jones »– est révolue. Les fermetures de puits de charbons au profit des mines à ciel ouvert, les menaces qui pèsent sur les industries traditionnelles ou encore le chômage, ont mis fin aux années glorieuses de cette région. Les habitants s’accrochent aux dernières mines encore ouvertes, envoient leurs jeunes hommes en Irak, rivalisent de piété et de protectionnisme, s’accrochent aux « vertus » d’autrefois .
Le pays du charbon, de la chasse et de la piété, traditionnellement démocrate, a rompu avec ses habitudes lors des deux dernières élections présidentielles. C’est souvent dans les Etats les plus pauvres que la popularité de M. Bush est la plus grande. Loin des bruits de New-York ou de Washington, c’est la rencontre avec une autre Amérique. Celle des vieux bastions démocrates et syndicalistes. Celle qui s’est mise à rêver républicain.