Ukraine, de Maïdan au Donbass, 2013-2022
« Les révolutions ne sont jamais écrites d’avance. Lorsqu’elles s’éternisent, le temps joue contre l’événement – peu à peu les héros s’épuisent et livrent des personnages aux destins de plus en plus incertains. Depuis des années, Guillaume Herbaut se rend en Ukraine pour y suivre les tensions entre les partisans d’un pays tourné vers l’Europe et ceux qui sont attirés par sa composante russe.
Cette lutte qui commence par l’occupation héroïque d’une place de Kiev se transforme en une guerre de tranchées dans l’est du pays : comment traduire cette installation d’un peuple dans ce qui devient aux yeux de tous une époque maudite ? Peut-être en donnant à chaque être révolté la figure d’un combattant, et le faire entrer dans la légende de l’actualité.
Comment ne pas rappeler que c’est là, à cet endroit précis du monde, au milieu du XIXe siècle, que la photographie s’est pour la première fois affrontée à la guerre ? Guerre de Crimée (1853-1856) : l’Anglais Roger Fenton avance avec son van-laboratoire tiré par six chevaux et dans lequel il développe ses plaques de verre au collodion. Elles serviront à faire graver « d’après photographie » les premières images de presse de l’histoire.
Herbaut retrouve quelque chose d’archaïque dans la guerre du Donbass : figures taciturnes, paysages figés, atmosphère gelée. Herbaut fraternise avec ses ancêtres photographes comme les séparatistes et l’armée ukrainienne rejouent l’antique dispute de l’Europe et de l’Asie. »
Michel Poivert – Historien de la photographie