Srebrenica, nuit à nuit, 2015
Le 11 juillet 1995, l’armée serbe de Bosnie attaque l’enclave musulmane de Srebrenica. Plus de 8 000 hommes seront massacrés en 3 jours. Vingt ans plus tard, la ville semble figée dans l’obscurité de son histoire. Une nouvelle génération erre dans ses vestiges. Elle a l’âge du génocide. (…)
Vivre à Srebrenica, c’est faire l’expérience de ce temps indéfinissable qu’est l’après-guerre. Si chacun sait quand commence cet « après », qui peut dire quand il s’arrête ? En déambulant dans cet espace où cohabitent les témoignages des temps d’horreur et de paix, une question émerge : « Y a-t-il une fin à la fin de la guerre ? ». En discutant avec les jeunes du coin, on devine que la nuit de l’histoire ne s’est jamais vraiment levée. Si le traumatisme est encore bien présent chez les survivants, les cicatrices affleurent toujours sur les façades. (…) La guerre est dans le décor, elle est aussi dans le tempérament rageur et désespéré de la génération post-génocide. La guerre, c’est celle qu’il faut mener au quotidien dans cet « après » qui vous colle au pied. Quand on a 20 ans, comment grandir dans des vestiges, comment s’extraire de cette nuit sans fin ? Impossible selon eux. (…) La jeunesse d’ici ne demande rien, merci pour elle. Naitre à Srebrenica est une injustice pour qui a 20 ans et veut simplement boire et faire l’amour. Et tous les programmes d’aide n’y pourront rien. Ademir, Milica, Merka, Miroslav ont l’âge du génocide. Dans la nuit de l’histoire, la ville leur appartient.
La série « Srebrenica, nuit à nuit » a remporté le Prix des Nouvelles Ecritures décerné par la SAIF catégorie Freelance en 2015.