Sète #17, 2017
« Des gens, des lumières. On pourrait dire que Sète se résume à cela sous l’œil d’Anne Rearick. Tout simplement, avec l’immense liberté qui est la sienne, avec la souplesse qui lui fait balader de façon élégante le carré de son cadre jusqu’à réduire, sans le limiter, l’espace de son expérience à ce carré magique parce qu’inexplicable.
Avant de parler de Sète, il faut parler de ce carré, de cette forme parfaite et classique qui, généralement, entraîne des compositions bien symétriques, « équilibrées », pouvant vite verser dans le conventionnel ou donner le sentiment de dater et qui nous renvoient implicitement aux années 1950 et à une tradition anecdotique de la photographie française.
Et puis il y a cette manière mystérieuse de cadrer, de choisir sa distance qui fait que nous percevons une respiration juste, une distance indiscutable, trouvée sans effort apparent, ne
cultivant aucun « genre », aucun « style », se confrontant au monde pour en relever avec bienveillance les empreintes déposées généreusement dans la forme déterminée par avance. Parfois le cadrage peut être sec, il peut trancher, mais sans que cela ne soit jamais dur ou violent. Il peut ainsi couper en deux un front, ce que nous oublierons immédiatement parce que cette mutilation nous offre la grâce d’un regard, il peut éliminer en grande partie le corps d’un personnage mais ce sera pour valoriser celui qui est près de lui. Même les cadrages radicaux sont empreints de gentillesse, voire de tendresse. D’empathie en tout cas.
C’est là que Sète devient autre chose. Outre – mais cela d’autres photographes nous l’ont déjà fait percevoir, différemment certes – que la ville regorge de personnages singuliers, de visages surprenants, d’acteurs de leur propre quotidien, elle se révèle douce. » Christian Caujolle