Réussir ou mourir, 2007
Rip Hopkins a passé dix jours à Behren-lès-Forbach, la ville la plus pauvre des 500 villes les plus pauvres de France – selon une étude du ministère de la Ville. Une immense barre HLM posée au milieu de la campagne lorraine, construite à la fin de la Seconde Guerre mondiale pour accueillir 15 000 mineurs de charbon importés d’Italie et d’Algérie française pour soutenir l’effort de reconstruction nationale.
A l’époque, la ville avait des allures de cité idéale, située au fond d’une vallée verdoyante, à quelques kilomètres de la frontière allemande. Les conditions de travail au fond sont difficiles, grosse chaleur, éboulements et coups de grisou. Mais la France a besoin de charbon, et les patrons des houillères ont mis au point un système néo-paternaliste qui protège les « gueules noires » de tout souci extérieur : logement gratuit, ou presque, sécurité sociale pour tous, colonies de vacances pour les enfants et solidarité apparente pour tout le monde. « Si ton évier était bouché le matin, les services de la ville réparaient ça avant que tu rentres de la mine l’après-midi », nous explique Bernard Schmitt, fils de mineur qui a passé toute son enfance dans le Behren des années 1950.
Dans les années 1980, le charbon français est devenu trop cher. Les mines ferment les unes après les autres, aucune industrie ne les remplace, et les 10 000 habitants qui restent à Behren se retrouvent coincés dans cette cuve où la solidarité a disparu en même temps que le travail.