Portrait d’une génération, 2004 – 2006
En 2004, à la recherche de lieux où personne n’imaginerait voir un jour des œuvres d’art, JR organise sa première exposition, sur les murs de la cité des Bosquets, à Montfermeil. Il photographie ses jeunes habitants et colle des photocopies en grand format de ces photos sur les murs.
En novembre 2005, au même endroit, dans un climat de révolte sociale provoquée par la mort de deux adolescents qui se sont retranchés dans l’enceinte d’un transformateur électrique pour échapper à la police, des émeutes éclatent et embrasent rapidement la ville. En un mois, plus de 10 000 voitures sont incendiées. Les émeutiers ne sèment pas uniquement le désordre dans d’autres banlieues, ils détruisent également leur propre quartier.
Dans toute la France, les gens découvrent à la télévision les images sidérantes de ces événements. Les médias montrent des jeunes gens lançant des cocktails Molotov, attaquant les policiers et les pompiers et pillant tout ce qu’ils peuvent. Tous les jours, des dirigeants politiques de tous bords (ceux-là même qui ont échoué à rendre la vie de ces habitants meilleure) interviennent, jonglant avec les mots à la mode : prévention, répression, intégration, immigration, jeunesse, assimilation, éducation, citoyenneté, respect, langue, génération, football. Ils parlent des symptômes de cette soudaine poussée de fièvre sans s’intéresser aux causes.
En 2006, en réaction à la manière dont les médias traitent ceux qui sont devenus ses amis, JR retourne au cœur du quartier et, avec son ami Ladj Ly, un artiste local, il monte un projet avec des jeunes des Bosquets. Tout en sachant très bien qu’ils ne sont pas tous des anges, JR veut contester le terme de « racaille » que le ministre de l’Intérieur de l’époque a utilisé pour qualifier les émeutiers. Armé d’un objectif de 28 mm, il réalise des portraits en gros plan de jeunes montrant des visages menaçants pour se caricaturer et colle les affiches agrandies sur des murs des Bosquets et des quartiers « bobos » de Paris.
52 Portrait d’une génération invite à regarder dans les yeux des jeunes gens jouant des caricatures d’eux-mêmes. Avec une certaine insolence, les portraits amènent les passants à s’interroger sur la façon dont les médias les représentent. Sont-ils des jeunes prometteurs, des voyous , l’avenir de la France ou une menace pour la cohésion nationale ? Quels sont leurs rêves et leurs cauchemars ? Faut-il les punir ou les encourager ? Les émeutes sont-elles une poussée de violence ou le début d’une révolution ? Et, surtout, faut-il leur fermer la porte ou les accueillir à bras ouverts ?
Portrait d’une génération, Destruction, 2006
En 2013, apprenant que les immeubles de la cité des Bosquets qui ont servi de supports aux collages originaux allaient être démolis, JR reprend Portrait d’une génération. Utilisant les photographies de la série originale, JR et son équipe collent en secret d’immenses portraits sur les immeubles avant qu’ils ne soient détruits. Les portraits apparaissent pendant la démolition, instaurant un nouveau dialogue entre l’histoire récente de Paris, la banlieue et ses habitants.