Lieux Ordinaires, 2005
Se laisser tenter par une vision panoramique, embrasser d’un seul coup d’œil l’étendue d’un paysage. S’arrêter et regarder. Assurément, Fabrice Picard nous y entraîne, mais à sa façon, habile et équivoque. Les lieux photographiés, sans être familiers, ne nous sont pas inconnus. Et pourtant, subitement, nous ne les saisissons plus, car sans cesse son point de vue choisit l’obstacle, la croisée de lignes, de formes, le rapport des masses qui vont déjouer nos attentes, en nous barrant l’horizon et la perspective.
Enserrés dans un réseau d’échalas noirâtres – perches tendues entre ciel et rivage -, confrontés à un treillage incertain qu’agrippent de sombres verticales, oscillant entre deux ouvertures faites dans l’ombre par la lumière, nous sommes projetés, hors repère, dans l’avant-scène, sans possibilité de fuite, ni de recul. C’est alors que commence le voyage, que d’un bout à l’autre du rectangle, notre œil captif se ballade et qu’il découvre, à travers de rigoureux panoramiques, l’étrangeté de lieux ordinaires… que naît un autre paysage.
Quentin Salomé