Les femmes de l’arrière-cour, Burundi, 2010
Chaque minute, une femme meurt en mettant un enfant au monde. 99% de ces femmes vivent dans des pays en voie de développement, dont plus de la moitié dans les pays d’Afrique subsaharienne.
Pour chacun de ces décès, 20 autres femmes souffrent de blessures, infections, maladies et/ou handicap à long terme, liés à leur grossesse.
La fistule obstétricale est une lésion des tissus qui provoque un écoulement permanent de l’urine et/ou de l’excrétion des matières fécales par le vagin. Elle est la conséquence d’un accouchement long et difficile qui n’a pas été convenablement assisté (souvent non assisté du tout). Dans la plupart de cas, les enfants décèdent.
Les problèmes sociaux engendrés par cette pathologie invalidante sont souvent aggravés par le manque de ressources nécessaires pour les soins de ces femmes, qui vivent au bord de la communauté. Plus de 80% des femmes qui souffrent de fistule sont chassées par leurs maris et elles ne peuvent pas travailler : elles vivent donc un isolement, total ou partiel.
En Kirundi, fistule se dit Ingwara Yo Mukigo: “la maladie de l’arrière-cour”, puisque les femmes qui souffrent de fistule, quand elles ne sont pas chassées, sont mises dans l’arrière-cour de la maison et travaillent comme femmes de ménage pour la nouvelle famille de leur mari.
Différentes ONG organisent aujourd’hui des campagnes pour opérer les femmes qui souffrent de fistule. J’ai suivi le parcours de différentes femmes avant, pendant et après leur opération.
Elles espèrent toutes retrouver une vie normale : travailler dans les champs, avoir une famille, des enfants, partager leur vie avec un homme.
Tous ces problèmes pourraient pourtant être évités grâce à un accès aux premiers soins médicaux pendant la grossesse et l’accouchement. Les femmes les plus exposées sont celles qui vivent dans un état de pauvreté extrême : dans les pays occidentaux, une femme arrive à l’hôpital en moins de 7 minutes alors qu’en Afrique subsaharienne elle marche pendant des heures, parfois des jours, pour arriver dans un centre de santé où elle n’est même pas sûre de trouver les soins nécessaires. Le risque de mourir pendant la grossesse ou l’accouchement est de 1 sur 4 000 en Occident, contre 1 pour 16 en Afrique subsaharienne. C’est la plus grande différence qui existe entre les indicateurs de santé des pays riches et des pays pauvres.
Il y a 10 ans, l’OMS déclarait déjà que l’échec de la politique visant à éradiquer la mortalité périnatale et ses conséquences invalidantes était une des plus grandes injustices sociales de notre époque.