Les esprits du Pernambuco, 2004
C’est sur les terres fertiles du Pernambouc que s’installent, lors de la colonisation, les « seigneurs de moulin » qui feront du Brésil le premier producteur mondial de sucre, au 18 siècle.
La valorisation de ce produit sur les marchés européens y attire, en effet, de nombreux colons. Pressés de peupler l’immense littoral en friche, les seigneurs portugais (mais aussi hollandais, normands ou anglais) s’unissent volontiers aux Indiens du pays, comme plus tard aux esclaves noires venus d’Afrique pour servir dans la casa grande, la maison de maître,
et travailler aux champs.
« Le ventre, qui donne les enfants, est la partie la plus productrice de la propriété esclave », clame alors un manifeste, cité par le sociologue Nordestin Joaquim Nabuco. De ces unions naîtra une population métisse propre à la région : les caboclos, aux imprévisibles caprices génétiques. Dans les chemins de terre qui saignent les champs de canne à sucre, il n’est pas rare de rencontrer des petits mulâtres roses comme des Jésus flamands, des Indiens roux, ou des galegos, négrillons aux boucles dorées, lointain héritage d’un ancêtre portugais. Avec l’abolition de l’esclavage, au XIXe siècle, le Pernambouc avait perdu sa place prépondérante sur la marché sucrier, mais l’invention du moteur à explosion fonctionnant à l’alcool l’a hissé au premier rang des pays pionniers du « pétrole vert », carburant de l’avenir.
Depuis quelques années, la crise économique a fait chuter la production, intensifiant le malaise social.