La gazelle aux yeux d’or, 2023/2024
Les contes et légendes marocaines évoquent avec une grande vivacité la relation particulière de l’humain à l’animal, pleine de poésie, de magie, d’animisme. Cette forme de narration dévoile aussi la réalité du quotidien marocain souvent précaire, pétrie d’entraide, de tradition, de patriarcat, et faisant place à une certaine poésie. Dans un très beau conte, une gazelle aux yeux d’or apparaît à un vieux touareg épuisé par les vicissitudes de la vie. Cette gazelle aux cornes vertes est magique. Elle parle et l’homme et l’animal s’épaulent. Elle le protégera, l’aidera et lui permettra de retrouver l’harmonie familiale. La nature est très présente, la lumière est étrange, une grande poésie se dégage de ce conte.
Au Maroc, des liens complexes et contradictoires se tissent entre l’homme et l’animal, dans différents milieux sociaux, que ce soit au quotidien à la maison, en famille, à la ville et à la campagne. L’animal peut incarner un sujet d’affection et de tendresse comme le chat, l’animal préféré du prophète Mahomet et aimé dans tout le pays. Ou l’âne reconnu pour sa bonté et sa sociabilité. Son endurance le livre à toutes les taches dures et laborieuses. Dans le livre Kalila et Dimna, les animaux parlent et dans la réalité ils ne se font pas toujours comprendre des humains. M’inspirant de la magie de ces contes, sans vouloir les illustrer, je suis à la recherche de cette gazelle magique, illusoire et invisible.
Dans la gazelle aux yeux d’or, le corps à corps, propre à mon écriture photographique, prend une forme particulière : étrange et familière tout à la fois. Grace à la lumière irradiante, jaune et rose, la magie des décors, une forme d’intemporalité se joue dans cette nouvelle approche à l’animal.
Tina Merandon