Calle del Cartucho, 2009
Déplacés par le conflit armé qui ronge le pays depuis soixante ans, des dizaines de milliers de sans abris envahissent les trottoirs de Bogotá, la capitale Colombienne. Abandonnées par le système, des familles entières s’enfoncent dans la misère et la délinquance.
En plein centre ville et à deux blocs du palais présidentiel, le quartier du Cartucho devient leur refuge.
Face à la pauvreté et au fléau de la drogue qui ne cesse de s’étendre, l’endroit se transforme rapidement en une gigantesque cour des miracles qui compte plus de 20 000 habitants. Pour la plupart, des mendiants, des voleurs et des criminels, regroupés en une confrérie des gens de la rue qui se nomment eux-mêmes les Neros, qui vient du mot companeros, compagnons. L’appellation Neros (prononcé nieros) est un terme général qui englobe tous ceux que la société normale considère comme faisant partie de la délinquance commune.
Ces pirates des villes ont gardé de nombreuses ressemblances avec les chiens de mer du XVIIIème siècle : certains aspects de leurs tenues vestimentaires, leurs règles sociales et un farouche esprit de liberté. Le Nero n’a ni Dieu, ni maître et ne se soumet ni à la société ni à la morale religieuse. C’est un marginal, un desperado qui ne supporte aucune contrainte et qui vit souvent en cavale, avec la mort aux trousses.
Overdoses, coups de couteaux, fusillades… Considéré par ses habitants comme la porte de l’enfer, le Cartucho est une sorte d’île de la tortue où l’on n’y respecte que l’argent et le plomb des balles, la loi du silence, et celle du plus fort.