Bishop’s madness, 1999
“ Giatros thanatos ”, c’est-à-dire le médecin de la mort. C’est ainsi que les employés du Sanatorium d’Agiassos surnomment le médecin responsable des patients de 1996 à 1997. Selon ce personnel du Sanatorium, le nombre de patients pendant cette période a chuté de 122 à 77 : 45 décès quand la moyenne annuelle était de 9. Selon les ordonnances, ce médecin aurait prescrit à ses patients des doses létales de tranquillisants. Les 45 morts ne figurent pas dans les déclarations de décès du Sanatorium.
Le Sanatorium n’a pas le statut d’hôpital psychiatrique mais la majorité des patients internés, par assimilation, le sont à cause de leurs “ troubles psychiatriques ”. Actuellement les 87 retraités, aveugles, handicapés physiques et mentaux, schizophrènes et psychopathes sont parqués ensemble dans des conditions inacceptables.
Le Sanatorium, comme d’autres institutions sociales, est dirigé par l’un des trois évêques de l’île de Mytilène, dans la mer Egée en Grèce. Les habitants de la région d’Agiassos, la ville dont dépend le Sanatorium, partagent de fortes croyances religieuses, ils vénèrent et craignent à la fois cet évêque tout puissant qui détient et contrôle autant le pouvoir temporel que spirituel sur ses sujets. Dans cette région isolée, qui fonctionne selon des règles féodales, tout procède de l’évêque, la vie comme la mort.
En 1995, le Sanatorium a accueilli trente nouveaux employés qui, pour la première fois, ne venaient pas de la région d’Agiassos. Ils décident d’écrire au conseil (présidé par l’évêque) qui gère le Sanatorium, une lettre décrivant les conditions de vie épouvantables des patients dans l’espoir qu’elles puissent être améliorées. La réponse fut abrupte, un mois plus tard, l’évêque menaça que si les employés ne lui demandaient pas pardon pour avoir osé écrire cette lettre, ils seraient tous licenciés, perdant ainsi leur précieux statut de fonctionnaire, qui en Grèce est une garantie de sécurité pour la vie. Les trente nouveaux employés du Sanatorium ont donc présenté leurs excuses.
L’église orthodoxe influence encore aujourd’hui une grande partie de la vie sociale, économique et politique en Grèce. Le Sanatorium d’Agiassos est un exemple de l’étendue du pouvoir de l’église et de ses abus.