Au fil des jours, 2004
Ce que je ressens, en voyant ces images de Patrick Taberna, c’est qu’il en a besoin pour vivre… Il faut voir pour vivre, ou vivre pour voir ? On passe d’endroits précis à des lieux vagues, d’un bruit à un bruissement, d’une odeur à une sensation, d’images solitaires à des images – volontairement – (re)groupées, « poétiquement » réunies…
Les photos sont en couleur mais est-ce qu’on s’en rend encore compte ? D’ailleurs le noir et blanc existe-t-il, et la couleur existe-t-elle ? C’est sans doute de cela que Patrick Taberna nous parle, que ce qui compte, ce n’est ni le carré ou le rectangle, ni la couleur ou le noir et blanc, c’est juste d’exister ; parce qu’il a décidé de les voir, de les faire.
La photographie plasticienne, humaniste, littéraire, etc… : fausses barrières ; il n’y a que des images qui parlent, et d’autres qui n’ont rien à dire (certaines qui parlent parce qu’elles n’ont rien à dire, la banalité comme langage ? Pas si simple, la poésie…). Qu’est-ce qui relie une femme de dos devant des cyprès, très italienne, à un aquarium de poissons rouges ? Un as de pique à un parking qui brille sous la pluie ? Les diptyques, triptyques, quadriptyques, mettent en scène « un monde », mais souvent une image seule suffit, l’air de rien, comme ça, parce que le vide entre deux immeubles de face est tout ce qu’il reste d’espace et de son, parce que derrière trois arbres il y a des jours et des jours de labeur dans un champ, parce qu’il pleut sur un pont en couleurs noir et blanc, et qu’avant de mourir, il faut prendre le temps de voir, de faire des photographies. Point.
Bernard Plossu