De l’Ukraine : Ceci est la guerre
Conférence avec Stéphane Duroy et Guillaume Herbaut – Modération Michel Poivert
22 nov. 2022
Depuis 20 ans, Guillaume Herbaut photographie l’Ukraine. Dès ses premières images, en 2001, les germes du conflit couvaient. Puis viendront la révolution orange, la révolution de Maidan, l’annexion de la Crimée, la guerre du Donbass et l’invasion russe. Alors que les conditions de travail des photographes de guerre sont devenues difficiles, tant ils sont encadrés et limités dans leur liberté de mouvements, les photographies de Guillaume Herbaut sont le fruit d’un projet au long cours, d’une forme d’intimité avec les habitants et d’une profonde connaissance du pays, de sa société et de son histoire. Exemptes de tout sensationnalisme, en marge de la captation directe du conflit, ses images révèlent les racines de la guerre.
Plus qu’elles ne la montrent, elles la sous-tendent et font surgir les convulsions de l’ex-empire soviétique.
Stéphane Duroy, dont le parcours s’est d’abord éloigné du reportage pour construire une œuvre interrogeant le rapport à l’histoire de l’Europe du XXe siècle, marquée par deux guerres atroces, ne photographie pas le conflit Ukrainien. Il le peint chaque jour et ce depuis le premier jour de l’invasion de l’Ukraine par la Russie. Il n’a jamais été sur place, mais, nourri par les informations et les témoignages, il établit un journal personnel du conflit en accumulant des peintures. Chacune dit la guerre et ses atrocités venant encore se jouer sur le continent Européen.
L’un comme l’autre ne sont pas des photographes de guerre, et tous deux s’affranchissent du spectaculaire. Ici, photographie et peinture se rencontrent, se confrontent et se répondent, dans leur capacité ou leur impuissance à déclarer ceci est la guerre. Ici, la photographie devient le médium de la durée et la peinture celui de l’immédiateté (comme l’écrivait Eugène Delacroix, « Un peintre doit savoir attraper au vol un ouvrier tombant d’un échafaudage dans le temps qu’il met à tomber »).
Là où la photographie échoue à transmettre l’atrocité absolue, là où la peinture n’apporte pas d’éléments de compréhension du contexte, la rencontre de leurs œuvres, finalement complémentaires, traduit les possibles et les limites de la représentation, de la perception, de la réception de chacun des médiums.
Captation vidéo par Filigranes Editions.